Lettre à Claude Olive, suite à une publicité inacceptable à Anglet

Monsieur le Maire,

Depuis quelques jours, le long du littoral du Pays Basque Nord et en particulier à Anglet, une campagne de communication est diffusée à l’attention principalement des touristes qui fréquentent les plages de la côte basque.

En effet, les promoteurs Carrefour Property et Centralia Groupe finalisent actuellement la commercialisation du projet immobilier Erreka. Alors que la situation du logement est de plus en plus compliquée pour la population locale, le nombre de résidences secondaires continue de grimper en particulier sur la partie littorale. Cette prolifération de logements vides la majeure partie de l’année, entraine une véritable confiscation de maisons et appartements pour la population locale.

Qu’une publicité puisse, en particulier dans le contexte actuel, promouvoir les résidences secondaires comme le fait cet affichage nous parait totalement insupportable. C’est en contradiction avec les aspirations de la population qui a pu maintes fois exprimer son mécontentement et la demande de solutions ambitieuses, notamment au travers des manifestations organisées par la plateforme Herrian Bizi – Se Loger au Pays. Au lendemain de la première manifestation de ce collectif, vous déclariez qu’en matière de logements il y avait « ceux qui manifestaient et ceux qui agissaient ». Alors Monsieur le Maire, entendez-vous agir pour mettre fin à ce genre de publicités provocatrices ?

Pour préciser notre réflexion, nous souhaiterions savoir si vous avez autorisé cette campagne d’affichage sur la voie publique sur votre commune. En tant que Maire, vous pouvez utiliser votre pouvoir de police et à ce titre, invoquer une atteinte à la moralité publique et interdire certains contenus publicitaires ou informatifs. Conformément à la jurisprudence, nous estimons qu’en l’état actuel de la situation du logement et du foncier, les circonstances locales particulières justifient le durcissement de la réglementation. N’y a-t-il pas à mener une réflexion dans le cadre de l’élaboration du Règlement Local de Publicité Intercommunal (RLPI) en cours d’élaboration à la Communauté d’Agglomération pour, non pas interdire la publicité des agences immobilières -ce serait contraire au droit-, mais en tout cas mettre en place une réglementation plus stricte qui empêcherait ce genre de messages provocateurs ?

Au-delà de cette campagne de communication qui est assurée la plupart du temps par des saisonniers qui ont des conditions salariales insatisfaisantes, nous nous questionnons également sur le contenu du programme immobilier. Pour rappel, ce programme construit sur une ancienne décharge a déjà fait parler de lui en matière de gestion des déchets puisque suite à la vidéo du journaliste Hugo Clément l’année dernière, vous aviez pris un arrêté municipal pour stopper le chantier. La réaction tardive et sous pression médiatique du promoteur Carrefour Property laisse penser à un certain laxisme en matière de gestion des déchets et d’impact environnemental du chantier.

Alors que le territoire connait une pression immobilière sans précédent, et que les réserves de foncier disponible doivent être plus que jamais gérées avec prudence, nous estimons que la question « Pour qui construisons-nous ? » devrait se poser impérativement avant chaque projet. Avec seulement 40% de logements sociaux prévus sur ce programme, nous sommes bien en dessous de la réalité du territoire. Pour rappel, près de 80% de la population locale est éligible aux logements sociaux. C’est également le taux préconisé par les travaux du Conseil de Développement du Pays Basque afin de rattraper le retard sur les objectifs SRU. Avec un prix de sortie à 249000 € pour un 2 pièces et 393000€ pour un 4 pièces, ces logements restent inaccessibles pour une majeure partie de la population locale qui souhaite vivre ici à l’année. Sans dévoiler le contenu des discussions entre la Mairie et les promoteurs autour de l’autorisation d’urbanisme, le prix final et la typologie des acheteurs (résidents principaux ou secondaires) a-t-elle fait l’objet de négociations ?

Comme évoqué, la situation du foncier et du logement dans notre pays est une réelle problématique qui a déjà amené les élus locaux à mettre en place des dispositifs innovants afin d’accroitre l’intervention publique en la matière et laisser moins de champ à la loi du marché libre qui est à l’origine du contexte que nous connaissons. Si notre mouvement revendique des changements législatifs afin que les Maires et les EPCI disposent d’outils plus efficaces, nous pensons qu’une attention permanente et une volonté politique forte peuvent déjà empêcher certaines dérives.

Cette campagne publicitaire est une provocation, c’est en tout cas ainsi qu’elle est perçue et vécue par bon nombre d’habitantes et habitants. Nous espérons qu’elle vous fera réagir tout autant que nous et que nous trouverons tous ensemble les moyens réglementaires afin de ne plus voir fleurir ce genre de communications sur nos plages, dans nos rues et nos boîtes à lettre.

En espérant que cette interpellation suscitera une réaction de votre part, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Maire, nos sincères salutations.

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