Interviews d’élues abertzale : Laetitia Navarron, Hendaia

Lors de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes qu’est le 8 mars, nous étions nombreux·ses à revendiquer un changement profond de système pour construire une société juste, égalitaire et féministe. Afin de prolonger ce temps fort, EHBai souhaite, par une série d’interviews, mettre en lumière des élues abertzale de gauche qui oeuvrent tous les jours pour un Pays Basque juste, féministe et écologique.

Nous commençons aujourd’hui par : Laetitia Navarron, cheffe de file des abertzale de gauche au sein du conseil municipal d’Hendaye !

 

Laetitia, tu as été co-tête de liste d’Hendaia Biltzen en 2020, aujourd’hui tu es la cheffe de file des abertzale de gauche au sein du conseil municipal d’Hendaye : quel a été ton parcours avant d’être élue ?

Au lycée, j’ai commencé par m’impliquer dans la vie sociétale en faisant partie d’Ikasle abertzaleak, puis j’ai rejoins l’association hendayaise Bixkiak, et rapidement je suis devenue membre d’Hendaia Biltzen (et avant Biharko Hendaia) depuis 2007. J’ai donc participé à deux campagnes en tant que militante et colistière avant de “franchir” le pas d’être co-tête de liste en 2020.

Comment as-tu, selon toi, réussi à prendre ta place au sein de la municipalité d’Hendaye ? 

Tout d’abord – il ne faudrait pas le nier – mon nom est connu à Hendaye, étant petite-fille et fille d’anciens élus Hendayais. Ensuite, et tant que le respect est présent, j’apprécie débattre avec les différentes personnes constituant le conseil municipal. L’aspect médiatique est important également car la personnification de notre groupe politique se fait bien souvent autour de mon nom. Le fait que je sois une femme attise, peut être, la curiosité de certaines personnes habituées à ce que ce rôle soit porté par des hommes.

De quelles actions de ce mandat es-tu fière ? 

Ce que l’on a pu “obtenir” de cette alliance avec la majorité en place est la modification simplifiée du PLU qui oblige maintenant à une plus grande part de logements abordables sur les créations d’habitats ; puisque nous sommes passés de 40 à 60% de logements abordables. Ensuite, le bilan est sucré-salé voir amer, les points d’accord que nous avions fixés n’ayant pas été respectés. Cependant, ce qui nous était décrit comme “infaisable” il y a 2 ans devient évident et simple à mettre en place maintenant. Je pense à “la ville 30”, par exemple.

Quel impact cette expérience de conseillère municipale a eu sur toi / ta vie / ton quotidien ?

Une exposition médiatique et sociale, surtout durant la campagne, tout en travaillant à 100% et avec trois enfants : cela fut intense ! Mais au lendemain du premier tour, nous étions toutes et tous confiné·es, cela a été une période très particulière. Ensuite, c’est une gestion et une organisation à trouver et maintenir. Parfois le tout n’est pas conciliable car les horaires ne permettent pas de participer à l’ensemble des rendez-vous. C’est également un rôle continuel à tenir car nos paroles deviennent les paroles de l’ensemble d’un groupe, pour moi qui suis assez impulsive c’est assez “non naturel” (rires!).

Quel est ton ressenti en tant que femme élue ?

Je ne me suis jamais trop définie par rapport à mon genre. Il me semble que la gauche abertzale a quand même une vision égalitaire de la société depuis bien longtemps, et le fait d’être femme n’est pas un frein pour évoluer dans ce monde politique. J’ai entendu plusieurs réflexions concernant ma candidature : « avec un homme vous auriez eu plus de votes » ou au contraire « j’ai voté pour vous parce que la tête de liste est une femme ». Ce qui me dérange le plus là-dedans, c’est qu’il n’est pas fait mention du projet ; le fait de mettre en exergue une personne semble ramener le contenu en arrière plan, c’est quand même problématique !

Y a-t-il des expériences ou un vécu que tu aimerais partager à ce sujet ?

L’opinion des gens est vraiment diamétralement opposée parfois. On m’a directement fait des réflexions plutôt bienveillantes et encourageantes ; ou totalement péjoratives. Dans un cas comme dans l’autre, le sexisme est de mise car ces réflexions n’auraient probablement pas été faites à un homme. Je mets ça sur le dos de la “nouveauté”, mais surtout j’apprends à mettre une distance entre la personne que je suis et ce que l’on pense que je suis.

A côté de ton rôle de conseillère, tu es professeure. Comment gères-tu cet emploi du temps ? Comment trouves-tu ton équilibre entre ta vie professionnelle, tes engagements, et ta vie personnelle ? 

Effectivement je suis enseignante, en maternelle et en plus, à Hendaye ! Donc je cloisonne énormément. Lorsque je suis à l’école, je ne suis plus une élue (pourtant lorsque les familles abordent des sujets sociétaux, mon détecteur se met en marche !). C’est un métier très prenant, souvent déprécié et jugé par l’opinion publique, car tout le travail “invisible” qu’il comporte est méconnu. Ma semaine est rythmée par mon agenda professionnel, l’intendance familiale et l’agenda politique. La mise en place de rituels ressourçants avec ma famille s’est avérée nécessaire et contribue à l’équilibre entre toutes ces vies !

As-tu des conseils à donner à une femme abertzale de gauche, qui pourrait te lire, et serait tentée de se lancer dans l’aventure des élections municipales 

« Oublie que tu es une femme si cela est un frein pour toi, ne te censure pas ! Tu es avant tout une porteuse de projets, d’idéaux, d’un modèle de société qui justement ne ferait pas de différence entre les genres. Plus on sera (femmes ou hommes) et plus loin on ira ! »

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